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2 janvier 2022

Un espoir de paix se dessine en Ethiopie

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  • Un espoir de paix se dessine en Ethiopie L’usage de drônes livrés par la Turquie a contraint les insurgés du Tigré à la négociationA la veille de Noël, un espoir de paix s’est soudain levé en Ethiopie, lorsqu’à Addis Abeba les autorités ont laissé entrevoir la possibilité d’ouvrir un dialogue avec les rebelles tigréens. “Cette embellie soudaine fait écho à une autre déclaration du gouvernement éthiopien, s’engageant à ne pas poursuivre l’offensive à l’intérieur des frontières du Tigré et, dans une étape ultérieure, à permettre enfin le déploiementde l’aide humanitaire dans cette province frappée par la famine. Ce geste de bonne volonté n’est pas inspiré par des considérations humanitaires mais par un renversement de la situation sur le terrain. Alors que, début décembre, encore, les rebelles tigréens se trouvaient à 200 km de la capitale Abbis Abeba et que le Premier Ministre éthiopien Abyi Ahmed, -par ailleurs prix Nobel de la paix- avait revêtu son uniforme de commandant en chef et pris la tête de ses troupes, l’utilisation massive de drones permit de détruire des dizainesde véhicules militaires, dont des blindés, mis en œuvre par les combattants du Front populaire pour la libération du Tigré. La route menant à Addis Abeba et qui aurait pu être celle de la victoire des insurgés s’était transformée en cimetière de chars abandonnés. Alors que l’Europe et les Etats-Unis s’étaient longtemps focalisés sur l’aide humanitaire qu’ils souhaitaient livrer à la provincerebelle et avaient multiplié les pressions sur Addis Abeba, d’autres acteurs étaient entrés en jeu”: l’Iran, les Emirats arabes Unis et surtout la Turquie. Soucieux de préserver leur accès à la Mer Rouge et à l’Océan Indien ces pays avaient décidé de fournir à Addis Abeba non seulement des drônes mais aussi des pilotes turcs formés à manier cesengins avec efficacité. Cette intervention changea la donne”: les rebelles tigréens qui, au début du conflit s’étaient emparés de dépôts d’armes considérables entreposés dans leur province par le gouvernement central, furent obligés de battre en retraite vers leurs bases régionales et d’avancer des offres de négociation.
  • Ce repli sur le Tigré, où le FPLT jouit d’une incontestable popularité avait aussi pour but d’éviter que les troupes érythréennes, qui s’étaient portées au secours d’ Addis Abeba, ne pénètrent dans la province rebelle, faisant monter encore le niveau des pillages et des exactions. S’adressant au secrétaire général des Nations unies, le président du FPLT proposa l’ouverture de négociations avec Addis Abeba, souhaitant que les pourparlers portent entre autres sur la levée du blocus frappant la province rebelle afin de permettre enfin l’acheminement de l’aide humanitaire ainsi que le rétablissement des services de base comme les télécommunications, les banques et l‘électricité. Une forte pression internationale s’exerce actuellement sur Addis Abeba afin d’inciter le gouvernement central à ne pas recourir exclusivement à une solution militaire et à ouvrir de véritables négociations politique pouvant déboucher sur un dialogue national. Même si dans les régions touchées par la guerre, le Tigré et aussi la région Amhara le bilan humain est catastrophique et qu’ont été annulés les progrès enregistrés au cours des trois décennies, l’enjeu d’éventuelles négociations dépasse l’angle humanitaire”: c’est l’avenir même de cet Etat fédéral qu’est l’Ethiopie, siège de l’Union africaine, qui est en cause. Il faut rappeler en effet que voici un an, c’est une opération de police montée par Addis Abeba qui s’était transformée en guerre totale. En effet, les leaders du Front populaire pour la libération du Tigré, repliéssur leur province après avoir dirigé le pays durant trois décennies, avaient organisé et remporté des élections unilatérales désavouées par le pouvoir central. Prévoyant d’éventuelles hostilités, les anciens guerilleros maoïstes su FPLT s’étaient emparés des importants stocks d’armes déposés dans leur province par le commandement nord de l’armée. L’offensive éthiopienne qui aurait du être une simple opération de police se transforma en guerre totale, et après que les dirigeants tigréens aient pris le maquis, la population de la province du Nord fit l’objet d’une répression féroce, des troupes venues d’Erythrée pour soutenir le nouvel allié éthiopien se comportant de manière particulièrement cruelle, multipliant les viols et détruisant d’importants sanctuaires religieux.
  • Au fil des mois, la guerre se propagea à d’autres provinces, dont la région amhara et la région oromo, la plus peuplée du pays, avec toujours le même cortège d’atrocités et de destructions, jusqu’à faire redouter l’implosion de l’Ethiopie elle-même, son éclatement en plusieurs entités dissidentes. Est-il encore possible aujourd’hui de recoller les morceaux, de panser les plaies et de jeter les bases d’une refondation politique de ce pays de 100 millions, point d’ancrage de l’influence et des entreprises chinoises en Afrique, dont l’éclatement déstabiliserait le continent tout entier”? Seul un dialogue national pourrait y parvenir, à conditionque les chefs de guerre, qu’ils soient vainqueurs ou vaincus mettent entre parenthèses leur orgueil et leurs ambitions